Sans méconnaître le talent des
Caravage et des Bruegel, nous n’apprécions guère leur esthétique, dont le
naturalisme reste étranger à ce que nous appelons le « classicisme essentiel »,
plus large que les classicismes historiques. Nous ferions pourtant une
exception pour le tableau de Pierre Bruegel le Vieux intitulé « Le
Misanthrope ». On y voit un vieillard encapuchonné dans un vaste manteau
bleu nuit, de constitution plutôt leptosome, cheminant dans le plat pays,
tandis qu’un enfant fou d’allure nettement picnique, au sourire stupide et aux vêtements déchirés, lui
dérobe sa bourse, qui a la forme étrange d'un cœur. Au devant du vieillard sont des clous, un trou, et un arbre déraciné: il va au devant d'une chute, puis de la mort, après que le monde lui aura dérobé son principe vital. Plus qu’un misanthrope, le personnage principal de cette
scène n'évoquerait-il pourtant pas le sage qui, ayant compris la folie de ce monde, y
passe sans plus prêter attention, sachant parfaitement que, bientôt, la malice et la bêtise des hommes auront raison de sa vie. Cette sagesse est-elle encore loin de celle
du Fils de l’homme, qui mourut cloué sur la Croix ? Pas davantage, à notre sens,
que celle de Job.
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