SOIR D’HIVER
Le brouillard tombe sur la ville,
blanc dans la nuit ; tout est tranquille.
Il a neigé : l’on n’entend pas
sur le pavé le bruit des pas.
Dans mon âme, quelle tristesse
comme un brouillard tombe sans cesse ?
Ce n’est pas même le chagrin :
fatigue, ennui, désir, dédain ;
Ce n’est pas même la souffrance :
souvenance et désespérance.
Sans violence et sans douleur
la tristesse envahit mon cœur.
Un flocon s’envole, léger
- et mon cœur voudrait s’alléger.
Sur la neige, un rayon livide :
mon Dieu ! tout est vain, tout est vide.
Le rayon meurt, et tout est noir :
dormons dans la glace du soir.
Gonzague de Reynold, Mémoires, t. II,
Genève, Éditions Générales, 1960, p. 309.
Facile plagiat de Verlaine ? Romantisme juvénile (l’auteur n’avait pas dix-neuf ans lorsqu’il écrivit ces vers) ? Que non ! En toute époque, la mélancolie est connaturelle au sage, tandis que le temps fuit inexorable, et que l’Éternel ne nous parle que derrière les voiles de la foi. Et que dire de cette époque-ci, si dégénérée qu’elle ignore complètement sa propre barbarie !
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