« L’effet d’une éducation chrétienne sur l’esprit
d’un jeune homme est d’autant plus profond qu’elle s’associe plus étroitement à
l’éducation humaniste qui domina si longtemps les écoles françaises.
Aujourd’hui en voie d’extinction, l’humanisme classique était encore vigoureux
au début de ce siècle, surtout dans les institutions d’enseignement libre
dirigées par des prêtres. Si l’étude du latin devait disparaître de notre pays,
elle y trouverait ses derniers bastions dans les collèges catholiques. Le latin
est la langue de l’Église ; le douloureux avilissement de la liturgie
chrétienne par des traductions en une langue vulgaire qui se vulgarise sans
cesse davantage, fait assez voir la nécessité d’une langue sacrée que son immobilité
même protège contre les dépravations du goût ».
Étienne Gilson, Le philosophe et la théologie,
Préface de Jean-François
Courtine,
Paris, Vrin, 2005, p. 14-15.
Il est à peine nécessaire de se demander quelle eût été la
souffrance de Gilson aujourd’hui, cinquante-quatre ans après la publication de ce texte en
1960. Non seulement l’étude sérieuse du latin a presque complètement disparu
des programmes de l’enseignement public secondaire, mais surtout l’Église a
renoncé au latin aussi bien dans presque toutes les célébrations liturgiques en forme ordinaire que dans la formation
intellectuelle de ceux qui devraient être l'élite de son clergé et de son laïcat. Le prétexte en fut je ne
sais quelle « stratégie culturelle » de proximité avec le peuple ;
le résultat est une faillite que seuls des aveugles ou des coupables peuvent feindre d'ignorer : le peuple n’est pas
redevenu chrétien, au contraire, il sombre chaque jour davantage dans une barbarie technicienne et inhumaine.
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