Benozzo Gozzoli, Le triomphe de saint Thomas d'Aquin, 1471

samedi 1 octobre 2011

Deux paysages de Claude Lorrain en « pendant »

            On sait que les amateurs de peinture, au XVIIème siècle, appréciaient les tableaux « en pendant » : deux œuvres commandées au même artiste, dont la taille, le thème, et la composition formaient une symétrie, et qui seraient exposées dans le même salon. Souvent, hélas, les aléas des ventes et des héritages ont dispersé ces diptyiques, dont il n’est plus possible de contempler ensemble les deux pièces, à moins qu’une exposition temporaire ne les réunisse provisoirement.
Le Claude Lorrain encore jeune des années 1637 – 1639 nous offre un exemple intéressant de ce type de création. Il s’agit d’un Paysage avec le port de Santa Marinella et d’un Paysage avec le lac d’Albano et Castel Gandolfo. Les deux sujets se correspondent d’abord … dans la réalité. Castel Gandolfo, où se trouve la belle résidence d’été du Souverain Pontife, se trouve au-dessus du lac d’Albano, sur le rebord d’un ancien volcan, au sud de Rome, au lieu que Santa Marinella est sise au bord de la mer, au nord de la Ville Éternelle, à l’extrémité d’une plaine côtière. Le jeu des similitudes et des oppositions est donc très facile à déchiffrer : c’est toujours la campagne romaine, avec l’éclat du ciel méditerranéen, l’harmonie des grands arbres, et la vibration de l’élément liquide ; mais une fois nous sommes à la montagne, et l’autre fois on nous transporte au bord de la mer. À cette première opposition, l’artiste ajoute celle de la lumière matinale, à Castel Gandolfo, et de la lumière vespérale, Santa Marinella étant représentée en fin de journée, alors que le soleil s’incline du côté de Civitavecchia. Le long de la côte, les personnages sont en mouvement : deux cavaliers, une amazone, et un piéton, encadrés par des chiens ; sur les hauteurs d’Albano, les pasteurs se reposent, appuyés sur leurs bâtons, ou assis en train de jouer d’un instrument. Sur l’une des toiles, les arbres encadrent la scène, tandis que, sur l’autre, ils occupent toute la gauche du plan central. En même temps, les deux compositions sont très proches : les personnages, plus considérables qu’ils ne le deviendront dans le Claude de la maturité, sont bien visibles au devant du tableau ; le plan d'eau se trouve dans la zone intermédiaire, et l’on notera que le port semble creusé dans un cratère, ce dont le pendant nous donne aussitôt la raison ; enfin des édifices situés à l’arrière-plan semblent s’effacer sous un ciel majestueux. C’est ce dernier, d’or ou d’azur, sensible et presque immatériel pourtant, que ces deux œuvres glorifient.

Claude Lorrain, Paysage avec le port de Santa Marinella, vers 1637-1638.
Paris, Petit Palais.

Claude Lorrain, Paysage avec le lac d'Albano et Castel Gandolfo, 1639.
Cambridge, Fitzwilliam Museum.


Vous trouverez ici la liste des tableaux et des dessins de Claude Lorrain que nous avons présentés sur ce blog, et que nous avons disposée selon l’ordre chronologique de la vie du peintre :
http://participans.blogspot.fr/2012/07/regards-sur-quarante-tableaux-ou.html

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